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J’étais lieutenant au 2°RIMa, déjà surnommé « le Deuxième de Marine », de 1971 à 1973.

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A l’époque, le « Grand Deux » n’était pas le Régiment professionnel et opérationnel qu’il est aujourd’hui. Le problème n’était pas qu’il fût un régiment d’Appelés comme la quasi-totalité de nos régiments, le problème était que nous étions dans la triste période 1970 / 74, quatre années qui furent fort pénibles pour nos Armées par absence de politique militaire : alors qu’il aurait fallu prendre des décisions, le gouvernement (Premiers ministres Chaban-Delmas puis Pierre Messmer, Présidence Pompidou)

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baissait continuellement les crédits et imposait au budget des Armées des charges financières nouvelles comme par exemple des interventions massives pour la protection civile. L’on ignorait jusqu’où l’on descendrait dans l’indigence et l’indifférence.

La bonne volonté des Appelés était sans faille à l’exception de quelques uns, assez rares, qui étaient antimilitaristes par idéologie. Les Appelés, et en particulier ceux du 2°RIMa au camp d’Auvours, avaient du mérite à supporter le Service Militaire Obligatoire dans les conditions de pauvreté qui leur étaient faites. Ils étaient payés 50FF par mois, une misère : avec une si faible solde, plusieurs d’entre eux ne pouvaient pas payer le billet de train tarif quart de place pour rentrer chez eux une fois par mois.

Les chambrées étaient chauffées par des poêles à charbon mais il n’y avait pas de charbon : j’emmenais mes Appelés ramasser du bois dans la forêt domaniale voisine, discrètement et sous prétexte de sortie sur le terrain.

Circonstance aggravante : à la même époque, la presse faisait un scandale parce qu’il n’y avait pas partout le chauffage central dans les prisons. Mais personne ne s’intéressait au sort des Appelés.

Difficile de leur expliquer dans ces conditions que l’état de Soldat de la République était une situation honorable. On y arrivait tant bien que mal mais l’ambiance était morose, l’alcoolisme menaçait les plus faibles de caractère.

La situation que je décris ci-dessus, je l’ai déjà racontée (sans préciser qu’il s’agissait du 2°RIMa car la pauvreté était la même dans tous les régiments) sur le blog « secret défense » de JDM, ici : 09/12/2009 à 12:00

Pour l’encadrement de contact il était difficile, voire impossible, de faire une instruction militaire sérieuse avec le peu de moyens dont on disposait. Je me souviens d’un chiffre : 400 cartouches par arme et par an pour le tir aux armes automatiques. C’est-à-dire qu’avec des armes tirant à la cadence de 600 coups / minute, ça faisait quarante seconde de tir par année !

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Nous l’encadrement, nous faisions ce que nous pouvions pour gérer la pénurie. Plus exactement qu’une formation militaire digne de ce nom, nous donnions à nos jeunes Appelés une « éducation militaire » : être à l’heure et en tenue, savoir se débrouiller sur le terrain, les règles impératives de sécurité avec les armes. Du fait que nous étions TDM, l’encadrement gardait à peu près le moral avec la perspective d’un prochain séjour individuel outre-mer ou l’idée de pouvoir un jour rejoindre l’un des Régiments d’engagés qui commençaient à être créés : le 3°RIMa passait en Engagés depuis 1969 avec la création du DEVOM (détachement d’engagés volontaires pour l’outre-mer)

 

lire

Création du DEVOM au 3° RIMa

, le RICM avait un ou deux escadrons d’Engagés.

Avec nos Appelés l’on prenait « l’alerte Guépard » pour, en principe, être prêts à partir en intervention urgente en Afrique. Mais l’on savait qu’une alerte à douze ou vingt-quatre heures était forcément bidon : pour envoyer des Appelés en intervention outre-mer, il aurait fallu un vote du Parlement, ou susciter des volontariats incontestables, ce qui ne peut pas se faire instantanément.

Pour ma part, cette période au 2°RIMa a pris fin en 1973, lorsque j’ai été muté pour deux ans en Guyane. Au retour j’ai obtenu le 3°RIMa, ce qui m’a permis de participer à l’Opération Tacaud en 1978, comme je l’ai raconté par ailleurs : http://operationtacaud.wordpress.com/

Au cours de cette opération Tacaud, un sergent-chef du 2°RIMa (je regrette d’avoir oublié son nom) a été affecté en individuel à ma compagnie pour remplacer un rapatrié sanitaire. L’opération Tacaud, s’ajoutant à la FINUL, a montré que nous étions limite en effectifs pour les interventions OM : dès lors il était logique que les TdM fussent en pointe de la professionnalisation, compte tenu de leurs traditions et de l’expérience outre-mer de la plupart des Cadres. C’est ainsi que le 2°RIMa a commencé de passer en Engagés vers la fin des années soixante-dix.

Yves Cadiou

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