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LES OPERATEURS RADIO DE LA RESISTANCE.


mise a jour 05 septembre 2011

Attendu, tant par les passionnés de la Résistance que par les radioamateurs, cet ouvrage abondamment illustré (300 photos dont 70 en couleur) présente de manière exhaustive les véritables Croisés de la France Libre que furent les opérateurs radio clandestins alliés parachutés en France occupée. Objet dune lutte impitoyable de la part des Allemands, les opérateurs radio avaient une espérance de vie de six mois Pour la première fois, la formation reçue en Angleterre est présentée en détail et cinq histoires vécues décrivent le quotidien de ces héros. La plupart des matériels radio, dont certains très rares, sont présentés pour la première fois en photo couleur.

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Remarque préliminaire : cet article vient en complément de celui paru sous le titre BCRA. Ces articles, ainsi que ceux qui suivront, sont en l’hommage de ceux qui ont lutté et trop souvent donné leur vie, pour que la France puisse « vivre ». C’est cela aussi, le devoir de mémoire, que se doit de perpétuer et de transmettre aux jeunes générations, une amicale « d’anciens ».

« Pianistes », tel est le nom de code utilisé dans la Résistance pour désigner les opérateurs radio qui assurent les communications entre la France occupée et Londres puis Alger. Leur aventure demeure encore souvent méconnue du grand public, car ces héros de l’ombre, formés à œuvrer dans la solitude, ont gardé le silence sur leurs activités. Pourtant dans leurs rangs, beaucoup son tombés. Les risques étaient grands et la répression féroce.


 


 

Après la défaite de juin 1940, les britanniques ne disposent plus d’aucune information sur la France occupée. Toutefois, la création par Churchill, le 18 juillet, du Special Operations Executive (SOE), chargé d’organiser des actions de luttes clandestines en Europe et comprenant une section française, entraîne la mise en place de liaisons radio.

Au printemps 1941, un rapprochement s’opère entre la « French section » du SOE et le service de renseignements de la France libre du général de Gaulle, le Bureau Central de Renseignements et d’Action (BCRA), dirigé par le colonel Passy, qui fournit à la Résistance intérieure des armes et du matériel de transmission. Ces deux organisations, qui entrent souvent en concurrence, regroupent ainsi tout un ensemble d’agents parmi lesquels des équipes d’opérateurs radio parachutés lors de missions de renseignement, de sabotage ou visant à la création de réseaux.

Les premiers opérateurs radio sont recrutés à Londres, à l’initiative du BCRA comme du SOE. Dans leur grande majorité, ces hommes sont des radios de formation, issus des trois armées même si certains d’entre eux proviennent de la société civile. Le plus souvent parachutés sans personne pour les réceptionner, ils accompagnent un officier ou une équipe, mais peuvent aussi être déposés « au clair de lune » par de petits avions, des Lysander, ou plus rarement par des sous-marins. Leur mission est d’entrer en communication avec les « Centrales », situées en Angleterre, chargées de réceptionner les messages.


La formation des premiers opérateurs envoyés en France est assurée par les britanniques. Il faut en moyenne trois à quatre mois pour former un « pianiste », les quelques personnels volontaires sans formation de base ayant pour la plupart une instruction plus poussée de près de six mois. Mais le recrutement des opérateurs devient très vite une cause de différend entre Français libres et Britanniques, ces derniers se refusant à travailler avec des agents qui n’ont pas suivi de formation dans leurs centres spécialisés. Ils estiment qu’un recrutement direct en France, comme le BCRA le préconise dès la fin 1941, présente des risques trop importants d’infiltration d’agents à la solde de l’Allemagne.

Ce n’est qu’un an plus tard, en raison de pertes considérables (75% des radios sont arrêtés au cours des années 1941 et 1942 et près de la moitié exécutés), que débute la formation d’opérateurs sur le territoire métropolitain. Ces derniers, contrairement à ceux issus du milieu militaire qui disposent de tous les papiers nécessaires à la clandestinité (fausses cartes d’identité, de travail d’alimentation, Ausweis de nuit pour pouvoir circuler…) ainsi que d’une solde qui leur est versée chaque mois par leur chef de secteur, sont tenus d’assurer par eux-mêmes leur subsistance.

A la suite du débarquement allié en Afrique du Nord en 1942, la France libre s’attache à recruter et à former, dès début janvier 1943, à Alger, des personnels spécialisés dans les liaisons et les transmissions, afin de garantir une plus grande autonomie vis-à-vis des services britanniques. En juillet, une Centrale radio française se met en place ; elle sert également de centre de formation radio.

Toutefois, les terribles pertes que connaissent les opérateurs radio sur le terrain conduisent certains responsables locaux, comme Jean Fleury, à organiser un système baptisé « Electre », qui repose sur une méthodologie nouvelle assurant une plus grande sécurité aux personnels. Ce système s’appuie sur quelques principes de base : raccourcir les séances d’émission (pas plus de trente minutes), séparer les vacations de réception de celle d’une émission, permuter les fréquences au cours d’une émission ainsi que les indicatifs afin de rendre plus difficile la localisation du lieu d’émission. Finalement, à partir d’avril 1943, le système Electre est généralisé, avec l’accord du SOE, à la France entière tout en étant affiné, les opérateurs d’émission oeuvrant le jour tandis que les opérateurs de réception travaillent de nuit.

Cette réforme conduit le BCRA à donner un certain nombre de consignes et de directives aux radios, transmises sous forme de microfilms. Ces instructions ne sont cependant pas toujours strictement respectées du fait des difficultés de la vie clandestine. Toutefois, ces mesures de sécurité réduisent les pertes même si la moitié des opérateurs tombent encore entre les mains des allemands. Rouage essentiel au sein d’un réseau, l’opérateur radio en est également l’un des maillons les plus faibles dans la mesure où le simple fait d’émettre le rend immédiatement repérable par l’ennemi. Il met ainsi en danger les autres membres du réseau qui sont en contact avec lui, à la différence de l’opérateur qui se contente de recevoir une émission.

Les règles de cloisonnement imposent donc d’isoler le « pianiste » autant que possible du reste du réseau. Il n’a de contact qu’avec l’équipe de protection qui assure sa surveillance et les agents de liaison qui lui apportent les messages chiffrés. Pour garantir la sécurité, il ignore le sens exact de ces derniers et ne peut donc en dévoiler le contenu en cas d’arrestation.

Une mission à haut risque.

Au cours des phases de vacation, le radio est totalement coupé du monde extérieur, avec un casque sur les oreilles et la main sur le manipulateur afin d’émettre ses signaux en morse. Il ne peut ni voir ni entendre arriver une personne extérieure. Aussi, a-t-il à ses côtés un « gardien » qui doit être en contact avec un guetteur qui surveille les environs. En outre, le pianiste ne doit jamais être armé ni transporter seul son matériel, bien que de telles pratiques n’aient pas toujours été aisées à respecter. Son gardien, bien souvent un agent de liaison, a également pour mission de trouver de nouveaux asiles, afin de rendre le repérage le plus difficile possible.

Un certain nombre de critères préside au choix des lieux d’émission qui doivent être situés dans un endroit dégagé et éloignés d’une ligne à haute tension. Une possibilité de repli en cas de repérage de l’occupant doit systématiquement être envisagé. Ces endroits (fermes, sacristies d’églises, maisons de particuliers, greniers, granges…) peuvent servir de cache pour du matériel mais aussi constituer des lieux d’hébergement pour le radio, notamment s’il s’agit d’un agent venant de Londres ou d’Alger. Lorsque les radios sont issus du milieu local, il leur est, à l’inverse, plus facile de se fondre dans l’environnement.

Les vacations s’effectuent essentiellement en ville dans la mesure où, outre le fait que le radio a besoin d’électricité pour opérer, les émissions en pleine campagne s’avèrent plus dangereuses, l’opérateur devant se déplacer avec son matériel, ce qui est contraire aux instructions du BCRA. Pour autant, les lieux d’émission ne sont pas forcément tous équipés d’une prise de courant mais ils doivent comporter nécessairement un éclairage, les opérateurs transportant avec eux « une douille voleuse » qui se branche directement sur l’emplacement de l’ampoule électrique. En cas de nécessité, le radio peut se brancher sur une ligne électrique au moyen de crochets plats reliés à un fil et suspendus à l’aide d’une canne à pêche. L’opérateur doit également installer une antenne de cuivre d’une vingtaine de mètres, facile à transporter et à dissimuler, placée dans une petite mallette et fixée en zigzag dans la pièce.

Des procédures rigoureuses.

Un des moments les plus délicats de la vie quotidienne du radio demeure le transport du matériel, assuré par des auxiliaires utilisant les moyens de convoyage les plus divers : autocar, bus, train mais surtout vélo ! Des femmes, agents de liaison, sont fréquemment désignées pour accomplir les missions de transport, déguisant au besoin du matériel en appareil médical (appareil de massage électrique) ou en fausse radio TSF.

L’instrument de base du pianiste est son émetteur radio. L’émetteur comme la réception se font dans des conditions de plus en plus rigoureuses à partir de l’été 1943. Ce sont les Centrales qui fixent les procédures par le biais d’un plan radio, document sous forme de micro-photos ou de feuilles tapées à la machine, parachuté avec l’appareil. Ce plan, que l’opérateur doit appliquer strictement, détermine les heures et les jours de vacation, les fréquence, les indicatifs ainsi que les clés de chiffrement pour une durée d’une quinzaine de jours. Les rendez-vous pour les quinze jours suivants sont, par la suite, fixés par la Centrale à l’opérateur. L’émission ne dure en moyenne que trente minutes, tandis qu’il ne faut pas plus d’une dizaine de minutes au radio pour mettre en place son appareillage. Le nombre d’émissions est variable : parfois deux ou trois dans une même journée, parfois aucune pendant plusieurs jours. Les Centrales recommandent par ailleurs de ne pas émettre plusieurs jours de suite à partir d’un même lieu et de laisser passer treize jours avant de reprendre ses activités sur un emplacement déjà utilisé. La réception, pour sa part, crée bien moins de difficultés dans la mesure où elle n’est pas repérable. L’opérateur demeure ainsi généralement sur un lieu unique et son plan de travail lui définit plusieurs heures d’écoute quotidiennes.

Dès les premières émissions, à la fin de 1940, les opérateurs radio font l’objet d’une traque incessante de la part des autorités allemandes mais aussi vichystes, ce qui explique les lourdes pertes enregistrées au cours du conflit, et plus particulièrement dans les années 1941 et 1942.

Au lendemain de l’armistice, un cadre législatif organise la recherche et l’arrestation des opérateurs et de tous ceux qui détiennent un émetteur-récepteur, en zone nord d’abord puis dans tout le territoire français après novembre 1942, date à laquelle la condamnation à mort est encourue. Un service spécial de la Gestapo est chargé de détecter les radios et de les arrêter : le repérage s’effectue en plusieurs étapes.

Des stations de détection locales situées sur tout le territoire ont pour mission de repérer sur un écran toute émission située dans leur région. Elles contactent alors des centres de détection placées dans toute l’Europe, à grande distance du point d’émission, qui déterminent chacune l’azimut de l’émission par rapport à leur propre position. Trois centrales sont nécessaires pour obtenir une triangulation, qui, pour la France passe par les centres de Brest, Munich et Berlin. L’intersection des trois azimuts forme un triangle d’une vingtaine de kilomètres de côté délimitant la zone d’émission. Ce repérage, qui s’effectue en une trentaine de minutes au début du conflit, est réalisé en moins de cinq minutes dans les derniers mois de la guerre !

Dans un second temps, la détection locale est à nouveau mise à contribution, cette fois à l’aide de voitures gonio équipées de détecteurs sur la longueur d’onde repérée, à l’intérieur du triangle précédemment déterminé. La Gestapo accompagne dans d’autres véhicules les voitures gonio qui stationnent dans toutes les grandes villes. Afin d’accélérer la détection locale, les allemands coupent fréquemment le courant quartier par quartier afin de situer avec plus de précision le lieu d’émission. Il arrive même que des hommes munis de détecteurs de champ parcourent les rues avec un cadre gonio en forme de cintre sous leur vêtement, déterminant ainsi le lieu d’émission à partir de l’intensité de l’onde.

Des prodiges de technicité.

Les progrès considérables accomplis dans le domaine des transmissions à partir de l’été 1943, fondés notamment sur l’adoption du système Electre, permettent fort heureusement de limiter considérablement les pertes, qui en juillet de l’année suivante, ne dépassent pas les 15%. Cet effort s’appuie également sur une miniaturisation de plus en plus poussée des postes qui deviennent des prodiges de technicité et de solidité, la production standardisée, due au SOE, permettant d’équiper en plus grand nombre les réseaux.

Dans le même temps, le trafic radio connaît une progression fulgurante : les communications multipliées par 100 entre 1943 et 1944, jouent un rôle déterminant dans l’information de l’état-major allié au cours du Débarquement et de la Libération. A cette date, la création de l’état-major des forces françaises de l’intérieur (FFI) met définitivement fin au dualisme entre les opérateurs travaillant pour le SOE et ceux rattachés au BCRA.

Marie Catherine Villatoux.

Chargée de recherche au Service historique de la Défense.

En « conclusion » : Gloire et Respect pour tous ces Héros (hommes et femmes) anonymes.

Le président.

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