LES « TIRAILLEURS MAROCAINS,ALGERIENS ET TUNISIENS »

DANS LES COMBATS POUR LA LIBERATION DE LA FRANCE.

Nota du président : à l’occasion du 70ème anniversaire de la Campagne de France, il me semblait judicieux et essentiel de procéder à  ce « petit rappel historique ».

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Au cœur des victoires remportées par l’Armée française lors des combats qui, de 1942 à 1945, ont conduit à la libération de la France, les Marocains, les Algériens et les Tunisiens ont apporté une large contribution.

L’Armée d’Afrique constitue un apport déterminant à l’armée française, qui, de la Tunisie en 1942 aux confins de l’Allemagne en 1945, participe à toutes les opérations conduisant à la libération du pays. Aux côtés des Goumiers, les Tirailleurs marocains, algériens et tunisiens sont à la pointe des combats, se couvrant de gloire, habitude prise depuis leur création au XIXème siècle.

La campagne de 1939-1940 contre l’Allemagne et l’Italie s’achève le 22 juin 1940 par l’humiliant rendrez-vous imposé par Hitler dans la clairière de  Compiègne. La France semble atteinte à jamais, comme elle le fut en 1415 après la défaite d’Azincourt. Comme souvent dans une pareille situation, deux solutions s’offrent aux Français. D’une part, celle du maréchal Pétain qui est le choix de l’Armée d’Afrique sur son territoire en dissimulant aux commissions d’armistice allemandes et italiennes, sous l’impulsion du général Weygand, un grand nombre d’armes et d’hommes. D’autre part, celle du général de Gaulle qui choisit de ne pas attendre et de maintenir la France dans la guerre. Malgré une tentative à Dakar en 1940, il ne peut rallier cette Armée d’Afrique.

Pendant que la politique de collaboration se confirme dans l’hexagone après l’entrevue de Montoire, les Français Libres, en Afrique, enregistrent les premiers succès notamment à Koufra sous le commandement du général Leclerc et à Bir Hakeim sous celui du général Koenig. Après le débarquement anglo-américain à Alger le 8 novembre 1942 et les combats qui suivent, les Tirailleurs nord-africains entrent enfin dans la composition des grandes unités constituant le renfort tant espéré.

La campagne de Tunisie.

C’est avec les équipements de 1940 que commence la campagne de Tunisie en ce mois de novembre 1942. Les français ont pris position sur la « Grande Dorsale » avec leurs régiments de Tirailleurs tandis que les anglo-américains tiennent les vallées avec leurs blindés. Les Tirailleurs sont en effet de redoutables montagnards et les « musulmans », comme les appellent les français d’Algérie et de métropole, forment 50% de l’effectif des régiments de l’Armée d’Afrique. Jusqu’au 7 janvier 1943, l’armée française contient quasi seule la pression des forces italiennes et allemandes débarquées en Tunisie. Le 19 novembre, les hostilités sont franchement engagées et la division de Constantine du général Welwert bloque la progression ennemie à Medjez-el-Bab et le 21 à Sidi-N’Sir. Sous la protection de la Luftwaffe qui conserve la maîtrise du ciel, la 10ème Panzerdivision débarque à Bizerte ainsi qu’une division italienne à Tunis.

Les Alliés sont maintenant en place et « la Grande Dorsale » tunisienne est solidement tenue. Après l’échec d’une tentative britannique, la 10ème Panzerdivision contre-attaque : son offensive est stoppée par les français qui marquent les avants-gardes de Rommel. Les germano-italiens passent à l’offensive et s’emparent du 19 au 23 janvier 1943 des réservoirs de l’Oued-El-Kébir, au sud du Mansour, de Robaa le 26 janvier, du colde Faïd les 30 et 31 janvier, puis du djebel Mansour les jours suivants : les Alliés sont mis en difficulté. A l’attaque en force de Rommel à Kasserine, les américains sont bousculés et perdent 150 chars et 2000 prisonniers. Les régiments nord-africains pour leur part s’accrochent à leurs montagnes. Leur opiniâtreté et leur acharnement à bloquer l’ennemi sur les cols provoquent l’échec de Rommel pourtant en passe de remporter une victoire décisive sur ce front allié enfoncé. La maîtrise de l’air abandonnant les forces de l’Axe, le cours de bataille change.

Les Alliés passent à l’attaque. Le 26 mars El Hamma tombe, le 27 la ligne Mareth est enlevée, le 28 Gabès est libérée. Ainsi, ce sont les Tirailleurs des 1er, 2ème, 7ème et 9ème régiments et les Zouaves du 3ème régiment et les Goumiers des généraux Welwert (division de Constantine), Conne (division d’Oran) et Mathenet (division du Maroc) qui reconquièrent sur 50 kilomètres d’étendue, la dorsale orientale entre le « Mausolée », à l’ouest de Robaa et le djebel Ousselat. Les Tabors des colonels Leblanc et de Lathour s’y distinguent particulièrement et les Spahis trouvent l’occasion de charger sabre au clair. La situation s’améliore largement pour les Alliés qui entament leur manœuvre finale du 5 au 13 mai 1943. L’Axe est définitivement chassé d’Afrique du Nord ; les Tirailleurs, comme il fallait s’y attendre, ont donné la mesure de leur capacité.

La campagne d’Italie.

C’est à Naples que débarque fin 1943, sous les ordres du général Juin, le Corps expéditionnaire français (CEF) en Italie. Les alliés ne sont guère impressionnés par leur arrivée. Le général Juin n’est pas accueilli à se descente d’avion et le CEF est aussitôt intégré à la 5ème armée américaine du général Clark, d’un grade d’ailleurs inférieur à celui du général Juin.

Ce dernier ne s’en offusque pas, il sait que c’est au combat que ses 100 000 hommes feront leurs preuves. Ce sera rapidement chose faite, compte tenu de la qualité des troupes, surtout des Nord-Africains, dans leur élément, et de l’état d’esprit qui règne au sein du CEF, comme l’écrira René Chambre : « un même désir passionné de délivrer le sol de la patrie, mais en même temps, de racheter la France de sa chute, de la purifier, de relever son prestige aux yeux de l’étranger ».

Viennent très rapidement les premières attaques victorieuses où l’Armée d’Afrique, malgré le froid et la neige des Abruzzes, se distingue par son ardeur manœuvrière à Colle la Bastia et à la Mainarde. Puis en janvier 1944, c’est la victoire du Belvédère où le 4ème régiment de Tirailleurs tunisiens fait des prodiges. Convaincus, les Alliés acceptent le plan Juin qui consiste à attaquer au sud de Monte Cassino dans la boucle du Garigliano, afin de s’emparer des monts Aurunci et en particulier du mont Majo. Seule la rusticité montagnarde de ses troupes lui permet  de les engager dans les secteurs les plus difficilement accessibles du front avec une logistique qui abandonne les roues au profit du sabot des mules.

Le 11 mai 1944, à 23 heures, des milliers de canons alliés ouvrent la route aux français survoltés par le souffle de la victoire qui plane sur le champ de bataille. Les jours suivants, les français se révèlent irrésistibles et les marocains plantent un immense drapeau tricolore, qui s’aperçoit à des kilomètres à la ronde, sur le sommet du Majo.

L’armée française est victorieuse, la route de Rome est ouverte. Au Palais Royal de Rome, Clark s’efface devant Juin en lui disant : « après vous, sans vous nous ne serions pas ici ». L’armée française retrouve sa place dans l’ordre de bataille des Alliés.

La libération de la France.

Pour le général de Gaulle, il est essentiel que le sol national soit libéré en partie par des troupes françaises afin d’effacer le désastre de 1940. Il confie le commandement de la 1ère Armée au général de Lattre de Tassigny qui vient de libérer l’Ile d’Elbe. Cette armée, c’est le CEF en Italie renforcé de la 1ère DB -division blindée- (général Touzet du Vigier-) et de la 5ème DB (général de Vemejoul). On y retrouve les « valeureux » de la 4ème DMM (division marocaine de montagne) qui, avant l’Italie ont libéré la Corse, aux côtés de cette infanterie à base de Tirailleurs marocains, algériens et tunisiens dont ils sont un élément essentiel.

Après une courte période de repos en Afrique du Nord, c’est le débarquement en Provence le 15 août 1944. Précédés par leurs compatriotes au sein des Commandos, les Tirailleurs, appuyés par les Cuirassiers et les Chasseurs d’Afrique, investissent Toulon le 20 août et libèrent Marseille le 27 avec 40 jours d’avance sur les plans d’opérations.

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Poursuivant l’armée allemande dans son repli tout au long du sillon rhodanien, au prix d’âpres combats, ils se heurtent aux forces du Reich qui durcissent leurs positions dans les Vosges. En plein hiver, ce sont les durs combats de Cornimont et de Gérardmer, puis le franchissement de la Schlucht, pour enfin prendre pied dans la plaine d’Alsace : le sang des Tirailleurs laisse sa trace sur la neige du Hohneck pris deux fois par le 4ème régiment de Tirailleurs tunisiens qui se bat farouchement dans ce « Sidi Brahim » des neiges. C’est la lutte pied à pied pour conserver Strasbourg, où s’exprime la ténacité de la 3ème DIA (division d’infanterie algérienne) dans les combats de mi-décembre après que cette ville ait été libérée. Les Tirailleurs accèdent enfin à la Haute Alsace et bordent les rives du Rhin. Cette frontière symbolique est bientôt franchie et les combattants venus du Maghreb entament leur marche victorieuse qui les mènera à Sigmaringen et à Stuttgart, pendant qu’à l’ouest quelques-uns des leurs participent à la réduction des poches de l’Atlantique.

Au prix de plus de 14 000 morts au combat, les Tirailleurs marocains, algériens et tunisiens ont pris une part essentielle à la libération de la France. Ils ont constitué le noyau de l’infanterie de l’Armée d’Afrique et, dans la tradition de leurs pères pendant la Première Guerre Mondiale, ils ont écrits une des plus belles pages de gloire de notre armée. Ainsi que le disait le maréchal Juin : « jamais cohésion n’a été aussi forte entre musulmans et français que pendant ce conflit ».

PS : aujourd’hui, les traditions et le souvenir des Tirailleurs marocains, algériens et tunisiens sont conservés par le 1er Régiment de Tirailleurs d’Epinal (Vosges).

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