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Le lieutenant-colonel Jerry Brooks, qui effectue sa troisième mission en Irak, n'est pas un militaire comme les autres: il est l'historiographe en chef de l'armée américaine dans ce pays.

Cet officier de 48 ans collecte des milliers de documents et écrit l'épilogue de l'histoire sanglante de cette armée, venue en 2003 pour renverser le tyran Saddam Hussein, avant de se retrouver comme force occupante engagée dans une guerre sans merci contre les insurgés, et qui dans un mois quittera définitivement ce pays.

Il y a eu durant ces huit ans jusqu'à seize historiens militaires, mais aujourd'hui ils ne sont plus que deux, confie-t-il à l'AFP.

"Le résultat, classifié pendant dix ans, sera publié dans des bulletins quatre fois par an et servira pour les livres d'histoire, pas pour mes fils plutôt pour mes petits-fils", assure ce militaire.

Il a aussi amassé une importante quantité de documents "qui serviront à alimenter les études dans les écoles militaires sur ce qui se passait en Irak durant cette période".

Selon lui, il y a trois leçons stratégiques à tirer de la guerre d'Irak: la nécessité de toujours bâtir des plans alternatifs, l'obligation d'avoir suffisamment de personnel et enfin l'importance de réussir à faire entendre son message.

"Vous devez faire des plans, des plans, toujours des plans. Il faut en permanence être prêt à toutes les éventualités", explique-t-il.

Ensuite, ajoute-t-il, "il faut être sûr d'avoir suffisamment d'hommes pour exécuter les missions et en avoir assez pour répondre à des situations inattendues". Enfin "l'information est une arme. Vous devez être capable de délivrer votre message avant votre ennemi".

Durant une récente visite pour les journalistes au Camp Victory, où était détenu Saddam Hussein et où se trouvait le quartier général de l'armée américaine, l'officier supérieur a aussi bien parlé de la bataille de Qadissiya entre les Arabes et les Perses sassanides au VIIe siècle que des vêtements portés par l'ancien dictateur quand il jardinait en prison.


Né à Pensacola (Floride), Jerry Brooks a obtenu une licence d'histoire à l'Institut militaire de Virginie en 1985 puis a été nommé en 1986 sous-lieutenant dans les blindés. Placé dans le cadre de réserve en 1988, il a décroché deux ans plus tard une maîtrise d'histoire à James Madison University en Virginie.

 

 

En fait, il est devenu historiographe militaire par hasard. Il a commencé à travailler dans les assurances. En 1995, en tant que réserviste, il a été envoyé à Fort Monroe en Virginie pour suivre un entraînement militaire annuel. C'est là qu'un colonel a demandé aux soldats présents si quelqu'un avait des notions d'histoire. Il a levé le doigt.

Il a alors rencontré James Stensvaag, l'historien responsable de la formation et de la doctrine militaire, à qui il a présenté sa maîtrise sur la guerre chimique. "En février 1996, j'ai reçu une lettre m'informant que j'étais nommé historien militaire et, cinq mois plus tard, j'étais envoyé en Bosnie".

"Vous pouvez dire que je suis devenu historien par hasard, mais ce fut un hasard heureux", se réjouit-il.

Depuis, il se partage entre sa passion et son métier d'assureur. Après l'attaque du 11 septembre 2001, il a été appelé au département d'histoire du Pentagone jusqu'à fin 2003. Il s'est occupé de la préservation de documents datant de la Seconde guerre mondiale et a fait partie de l'équipe chargée d'établir une chronologie détaillée de la situation en Afghanistan et en Irak.

Il a effectué deux séjours d'un an en Irak, en 2005 et 2008, avant de revenir en mai. "Je me concentre aujourd'hui sur l'action américaine en Irak alors que les deux premières fois mon centre d'intérêt était les actions opérationnelles, notamment du commandement général", explique-t-il.